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Ce qu’il faut voir ou pas en salles cette semaine.

L’ÉVÉNEMENT

SILENCE ★★★★★
De Martin Scorsese

L’essentiel
Un chef d’œuvre qui pose plus de questions qu’il n’impose une vision.

Un paradoxe d’abord : Silence n’est pas un film sur la religion. Ou pas seulement. Il peut être vu indifféremment avec un œil croyant, agnostique ou athée. Pas de miracle à l’horizon, pas de prêche, juste un homme qui se débat avec son engagement, sa foi, et le silence. Le silence du titre, c’est celui de Dieu, qui ne répond pas. Deuxième paradoxe puisque le héros attend un signe, une réponse, alors que Dieu n’est le plus souvent qu’un assourdissant silence. « Je ne veux pas me parler à moi-même et croire que c’est Dieu qui s’adresse à moi. Il y a d’abord le silence de Dieu », disait Julien Green. Le genre de questions et de conflits insolubles que Scorses met sur la table dans un de ses films les plus beaux, les plus majestueux et les plus tourmentés.
Gaël Golhen

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PREMIÈRE A AIMÉ

AMERICAN HONEY ★★★★☆
D’Andrea Arnold

Il y a un côté conte dans American Honey, un côté secte dans ce gang d’enfants perdus. Comme une famille Manson dont les seuls rituels seraient de fumer sans fin et de baiser sans joie. Leur absence d’horizon existentiel trace la voie à ce film conçu comme un gigantesque maelstrom sensoriel, un film trip jamais aussi grisant que quand il ne fait pas mine d’avoir une histoire à raconter (une love story qui grandit au fil des kilomètres, ça suffit pour occuper deux heures quarante) et se laisse aller au pur plaisir de la digression clippesque.
Frédéric Foubert

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SEULS ★★★★☆
De David Moreau

La réussite de l'adaptation de l'excellente BD de Vehlmann et Gazzotti est d'ordre esthétique et narratif : plutôt que de copier la ligne claire et les couleurs tranchées des planches, David Moreau choisit une photo noire et violette, foncièrement sombre -tout comme le script qui condense brillamment les cinq premiers tomes de l'oeuvre, tout en évoquant des phénomènes adolescents brutaux sans prendre trop de gants. Boosté par le score synthé de Rob, un gros effet spécial impressionnant (mais chut) et un casting de jeunes pousses en béton armé, Seuls a décidément une sacrée gueule.
Sylvestre Picard

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LE CONCOURS ★★★★☆
De Claire Simon

Les lourdes grilles de la Femis (la prestigieuse école française formant aux métiers du cinéma) s’ouvrent, laissant se déverser un flot impressionnant d’étudiants venus participer à l’examen écrit, première étape d’un concours hyper sélectif –le quota d’admis est ridicule eu égard au nombre de postulants. À la façon d’un Frederick Wiseman, Claire Simon plante sa caméra dans une grande institution, se rend invisible et enregistre tout ce qui s’y passe : le remplissage fastidieux des dossiers d’inscription, la lumière de l’amphi qui s’éteint sur un retardataire, les pauses clope qui se transforment en procès du concours, le stress des candidats lors des oraux, les commentaires off acides des jurés… Édifiante radioscopie, Le Concours interroge au fond sur la nature subjective des choix que sont amenés à faire les jurés, obligés de composer avec le talent et l’ambition des élèves et leur capacité à se fondre dans le moule de cette école pas comme les autres. Un artiste, un créatif doit-il être normalisé ? « Vous avez trois heures à partir de maintenant », pour paraphraser l’un des intervenants.
Christophe Narbonne

PREMIÈRE A PLUTÔT AIMÉ

LEGO BATMAN ★★★☆☆
De Chris McKay

En 2014, Phil Lord et Christopher Miller redonnaient un coup de fouet à la marque aux briques jaunes et au cinéma d'animation tout entier avec La Grande Aventure Lego. Un film au rythme démentiel, objet pop totalement dans son époque qui multipliait les références. Lord et Miller sont depuis partis faire un tour du côté d'une galaxie lointaine, très lointaine et c'est Chris McKay (superviseur des effets spéciaux et chef monteur de La Grande Aventure Lego) qui a pris la relève pour le premier spin-off de la franchise : Lego Batman.
François Léger

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BROTHERS OF THE NIGHT ★★★☆☆
De Patric Chiha

Patric Chiha (Domaine, avec Béatrice Dalle) est allé promener sa caméra du côté des bars interlopes de Vienne, à la rencontre de jeunes prostitués roms et bulgares, qu’il filme dans un mélange indiscernable de documentaire et de fiction. Le « reportage » est constamment transcendé par l’aisance des jeunes mecs devant la caméra, et surtout par cette photo quasi-irréelle, baignant dans un éternel crépuscule bleu et rose, qui donne l’impression d’évoluer dans un film de Fassbinder. C’est Querelle, « en vrai ».
Frédéric Foubert

UN PAESE DI CALABRIA ★★★☆☆
De Shu Aiello et Catherine Catella

Dans l’extrême sud de l’Italie, le village de Riace, comme tant d’autres, a été victime de l’exode rural depuis les années 1960. Maisons abandonnées, commerces désertés, école, fermée, jusqu’à ce qu’un beau jour, 200 réfugiés kurdes débarquent sur ses cotes et, avec l’aide des habitants, contribuent à faire renaître cette terre en déshérence. Depuis, les vagues successives de migrants qui tentent leur chance en Europe sont accueillis de manière exemplaire par une communauté qui se réinvente grâce à ces flux migratoires. C’est une bien belle histoire que raconte ce documentaire lumineux bourré de bonnes intentions, peut-être un peu trop pour être totalement honnête – beaucoup de questions éventuellement dérangeantes pour sa démonstration sont laissées de côté. Mais à l’heure où l’Europe se crispe sur la question des réfugiés et où l’Amérique se déchire sur un décret anti-immigration, ce film engagé présenterait presque un caractère d’utilité publique.
Vanina Arrighi de Casanova

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

NOUS NOUS MARIERONS ★★☆☆☆
De Dan Uzan

Karim est prêt à tout pour devenir champion de boxe, au risque de sacrifier son corps, déjà abîmé par les combats, et sa relation avec Faten, qu’il est censé épouser mais à qui il n’apporte aucune sécurité financière. Il va devoir choisir entre l’amour et sa passion… L’argument, assez banal, de Nous nous marierons n’est malheureusement jamais transcendé par la mise en scène, qui se contente de facilités « naturalistes » (caméra portée, feeling documentaire). Le film tient quand même debout grâce au charisme des interprètes, Karim El Hayani en tête.
Frédéric Foubert

Et aussi

Cinquante nuances plus sombres de James Foley
La règle du jeu d’Ambroise Carminati

Reprises

Le livre de la jungle de Zoltan Korda
Du silence et des ombres de Robert Mulligan
Les nouvelles aventures de Ferda la fourmi de Hermina Tyrlova