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Vingt ans plus tard, on prend (presque) les mêmes et on recommence. Prévu pour le 27 juillet 2016 en France, Independence Day Resurgence racontera comment les humains se sont préparés au retour des aliens et ont pioché dans leur technologie pour développer des armes de destruction massive.

Sur les lieux du tournage à Albuquerque, au Nouveau-Mexique, rencontre avec Dean Devlin, co-scénariste et producteur de cette suite signée Roland Emmerich.

Le premier film était à la gloire des États-Unis. Cette suite semble un peu moins patriotique, avec une union entre les pays pour résister aux aliens. 
Oui, les choses sont bien différentes. Les peuples travaillent ensemble. Et le film se déroule effectivement partout dans le monde, mais on va tout tourner dans ces studios d’Albuquerque (rires)

Roland Emmerich disait dernièrement que les gens ne sont pas intéressés par le grand spectacle si les personnages ne sont pas développés. C’est aussi votre avis ?
Le grand spectacle ne fonctionne que si on s’intéresse aux personnages. On a fait Independence Day et Stargate qui ont été de grands succès, mais par exemple Godzilla n’a pas marché et c’est sûrement parce qu’on n’avait pas assez bossé les personnages. C’est principalement de ma faute, j’ai été un peu arrogant au moment de l’écriture et j’ai passé trop de temps sur les scènes d’action. Je ne me suis pas assez demandé qui étaient ces gens, pourquoi on devrait s’intéresser à eux.

Vous avez vu le Godzilla de Gareth Edwards ?
Non. C’est trop dur pour moi. Je voulais qu’il puisse voir le jour et qu’il soit un succès parce que j’adore Godzilla. Mais ce que j’ai vécu avec celui de 1998 était tellement compliqué que je n’ai pas pu me résoudre à aller le voir.

Quand je pense à votre Godzilla, j'ai toujours en tête cette scène avec Jean Reno qui s'indigne du goût du café américain avec un accent à couper au couteau.
Oh, vous n’avez pas aimé son personnage ?

Disons que c’est un peu amusant à regarder quand on est Français.
Mais c’était fait pour être marrant ! Ce sont des clichés mais c’était drôle. J’adore Jean Reno, on a fait un autre film ensemble, Flyboys. C’est un super acteur, sous-utilisé aujourd’hui. Et c’est un type en or.

On vous a mis la pression pour faire une suite à Independence Day ?
Beaucoup de gens nous ont mis la pression durant des années pour qu’on fasse une suite à Independence Day. On a toujours dit non. Et puis le 11 Septembre est arrivé et j’ai eu une idée de scénario. Roland Emmerich s’est dit que ça pouvait marcher et on est allé voir 20th Century FOX, qui nous a payé beaucoup d’argent pour écrire le script. Et quand j’ai terminé, Roland et moi avons réalisé que ce ne serait pas une bonne suite. Et on a rendu l’argent ! La FOX n’avait jamais vu ça avant : "Vous n’êtes pas obligés de rendre le pognon !" En fait, on ne leur a même jamais montré le script. On ne voulait pas qu’ils le lisent.

Ça parlait de quoi ?
Le premier Independence Day était un film de guerre et j’ai essayé de faire un film sur la paix. Mais ça ne marchait pas dans cet univers. 

Il n’y avait pas d’aliens ?
Si… Mais des extraterrestres différents débarquaient, des non-violents… Bref, ça ne fonctionnait pas. On n’allait donc pas le faire et puis il y a quelques années, quand on bossait sur 2012, Roland a commencé à avoir des idées, à voir des images bien précises dans sa tête. Cela faisait près de douze ans qu’on n'avait pas travaillé ensemble mais pendant un dîner, il m’a dit un truc qui m’a marqué : "Tu sais Dean, au moment de notre mort, on sera pour toujours les mecs qui ont fait Independence Day. Pourquoi on n’essaierait pas vraiment de faire une suite, un truc qui en vaille la peine ? Si on n’y arrive pas, tant pis". On est parti à Palm Springs et c’était exactement comme à l’époque. En quelques heures, on avait enfin trouvé ce qu’on voulait faire. Le script a été écrit dans la foulée et on ne l’a apporté aux gens de la FOX que quand il a été terminé. Ils ont adoré.

Au début, Will Smith était censé jouer dedans.
Effectivement, il était dans le scénario. Et puis il a décidé de ne pas revenir. C’était un vrai coup dur mais on a vite réalisé que le premier film était un film choral. Si Will Smith avait été dans Independence Day Resurgence, il en aurait forcément été la star. On a vu ça comme une opportunité de revenir aux sources, d’introduire de nouveaux personnages et de faire revenir quelques anciens. Je suis évidemment triste que Will ne soit pas là, mais d’une certaine façon c’est une bénédiction.

Il y a eu beaucoup de changements par rapport à la première version du scénario ?
Il a fallu réécrire beaucoup de choses mais les idées de base sont là et tout ce que j’ai écrit pour Jeff GoldblumBrent Spiner et Bill Pullman est resté. Les scénaristes James A. Woods et Nicolas Wright, qui ont écrit la dernière version du script, ont encore amélioré les choses. 

Dans Independence Day Resurgence, c’est désormais une femme, Sela Ward, qui est présidente. Il y a un message derrière ?
Ce n’était pas dans la première version du scénario. Parce que je voulais James Rebhorn en président. Et puis il est mort. J’aurais vraiment aimé qu’il revienne et puisse jouer le président, son décès a été une tragédie pour moi.

Que doit-on comprendre du titre "Resurgence" ?
C'est la résurgence des aliens, la résurgence de l’union des humains… Et j’espère la résurgence de la popularité du film pour qu’on puisse en faire d’autres !

Qu'en est-il de la rumeur d'un Independence Day 3 développé en même temps que le 2 ? 
Au départ, on avait écrit le 2 et le 3 en même temps. Mais c’était sûrement arrogant de se dire que les gens voudraient absolument en voir plus. On s’est dit qu’on allait en faire qu’un pour commencer, mais pensé de façon à ouvrir la voie à un "cinematic universe", un peu façon Marvel Studios. Donc l’enjeu n’est pas d’enchaîner les suites mais de raconter une histoire plus vaste. On pourrait décider de faire un film sur le personnage de Jeff Goldblum ou celui de Liam Hemsworth. C’est plus intéressant qu’une simple trilogie. C’est un univers en soi et les enjeux et la nature même du conflit sont bien plus importants que ceux du premier film.

Le prochain film ou spin-off pourrait donc se dérouler sur une autre planète ?
Regardez Independence Day Resurgence, on en reparlera après (sourire).

Verra-t-on certaines scènes qui font écho au premier ?
On n’a pas voulu remaker le premier. Mais on a piqué des choses qu’on aimait ici et là et tenté de les faire revivre aux spectateurs. Des émotions, des éléments visuels qui étaient révolutionnaires à l’époque. Et ce n’était pas facile, parce qu’un paquet de films ont fait des choses extraordinaires visuellement entre 1996 et aujourd’hui. Mais Roland est le meilleur pour ça. 

Du premier film, on se souvient évidemment de la destruction de la Maison Blanche.
Attendez de voir ce qui arrive à la Maison-Blanche dans celui-là ! Et ce qui est intéressant avec Independence Day Resurgence, c’est qu’il s’agit d’un univers parallèle. Le monde s’est reconstruit après l’attaque des aliens mais par exemple Al-Qaïda n’a jamais existé, le World Trade Center avait déjà été détruit 1996 par les extraterrestres. Apple n’est pas devenue l’entreprise qu’on connaît puisque la technologie alien est devenue monnaie courante. Donc l’histoire est bien différente de la nôtre et a dévié en 1996.

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On peut s’attendre à une vraie fin ?
Oui. La première version du script dont je vous parlais était effectivement en deux parties mais on a changé d’avis. Il y a une vraie fin, avec la possibilité de continuer, évidemment. Mais pas de cliffhanger abrupte, rassurez-vous.

Vous êtes le producteur du reboot de Stargate, où en est ce projet ?
Au départ on ne voulait pas faire de suite à Independence Day parce que ça n’avait jamais été prévu. Mais Stargate est différent, c’était censé être une trilogie dès le départ. C’était un film indépendant, avec de l’argent français d’ailleurs : c’était Studio Canal le financeur. Mais ils ont flippé avant la sortie du film et ont vendu les droits à MGM pour cinq millions de dollars ! Et MGM ne voulait pas de suite. Durant des années, je n’ai pas arrêté de les appeler pour les supplier. Finalement, ils ont plus ou moins perdu les droits puisqu’ils n’ont rien fait avec et les nouveaux propriétaires (NDLR : MGM fait équipe avec Warner Bros) ont dit qu’ils étaient partants. Mais c’est trop tard pour faire des suites maintenant. Les acteurs sont trop vieux pour l’histoire qu’on veut raconter. Donc on est reparti de zéro et on va faire une trilogie.

Avec la même histoire ? 
La même mais… étendue. En 1994, on n’avait pas la technologie d’aujourd’hui et un budget assez peu élevé de 50 millions de dollars. On a été obligé de revoir à la baisse l’échelle de cette histoire. Ce reboot sera l’occasion d’inclure toutes les idées qu’on avait dû laisser tomber à l’époque. Donc on relance le premier film et si ça fonctionne, on fera deux suites.

Vous savez déjà quand le film va entrer en production ?
Dès qu’on a fini le tournage d’Independence Day Resurgence, j’espère. Deux jeunes scénaristes sont en train d’écrire ce nouveau Stargate en ce moment.

Interview François Léger (@FrancoisLeger)