Guide du 21 octobre 2020
Gaumont Distribution/ Warner Bros. France / StudioCanal

Ce qu’il faut voir cette semaine.

L’ÉVÉNEMENT

ADIEU LES CONS ★★★★☆
D’Albert Dupontel

L’essentiel
Albert Dupontel célèbre une fois les gens en marge d’une société trop déshumanisée pour eux avec un mélange aussi explosif que délicat de poésie et d’absurde. Après un détour multi-Césarisé par l’adaptation d’une œuvre préexistante (Au revoir là- haut), revoici Albert Dupontel à la tête d’un film entièrement écrit par ses soins. Mais d’un projet à l’autre, qu’il l’ait initié ou non, Dupontel construit surtout une œuvre de plus en plus conséquente célébrant à sa manière – empathique et bien secouée –, cousine de celle du duo Délépine- Kervern, les accidentés de la vie, les marginalisés par une société trop cynique pour eux.
Thierry Cheze

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PREMIÈRE A ADORÉ

PETIT VAMPIRE ★★★★☆
De Joann Sfar

Joann Sfar avait affirmé son statut d’auteur au cinéma avec un biopic pas comme les autres sur Serge Gainsbourg et son polar shooté comme un giallo, La Dame dans l’auto avec des lunettes et un fusil (2015). Succès et César pour le premier, flop sévère pour le deuxième. Est-ce que redonner vie sur grand écran à sa BD Petit vampire serait une tentative de se refaire ? De jouer la sécurité ? dents, sans hésitation.
Sylvestre Picard

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MICHEL-ANGE ★★★★☆
D’Andreï Konchalovsky

Il y a le monolithique de 2001 et, désormais, le bloc de marbre blanc de Michel-Ange. Dans les deux cas, son apparition cristallise les passions et c’est sur leur surface à priori lisse que se fracassent les mystères du monde. « Ce n’est pas un bloc, c’est un monstre ! » éructe ici Michel-Ange. En se confrontant à l’un des artistes les plus immenses de l’histoire de l’humanité, Andreï Konchalovsky (Runaway Train, Tango & Cash…) devait savoir où placer l’esthétique de son récit : lové dans une Renaissance dorée ou au contraire dans la fièvre et dans la boue. Son Michel-Ange (Alberto Testone, d’une justesse inouïe) est présenté d’emblée comme une semi-loque, alcoolique et fou, son génie créateur coincé entre les désirs de deux familles rivales, « des assassins qui ne méritent pas toute cette beauté ! ». L’artiste ne peut dès lors exister que loin de ses contingences humaines, loin du tumulte, dans la montagne à chercher la matière sur laquelle il posera ses mains. Le film s’attarde sur la force tellurique d’un monde que les hommes subliment et saccagent en même temps. Konchalovsky parvient avec une simplicité apparente à nous faire ressentir les affres de la création. Son film reste concret, la transcendance s’impose d’elle-même, sans s’exhiber. On revient inlassablement sur la terre ferme après avoir cru tutoyer les Cieux : « Je cherchais Dieu, j’ai trouvé l’Homme… », se désespère l’auteur de la chapelle Sixtine. Triste sort. Le film, lui, est en tous points sublime.
Thomas Baurez

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PREMIÈRE A AIMÉ

MISS ★★★☆☆
De Ruben Alves

Un couple de concierges portugais qui a le mal du pays mais que leurs proches et leurs employeurs vont tout faire pour les retenir à Paris. Alex, un jeune homme de 24 ans qui entreprend de réaliser son rêve de gamin : devenir Miss France. Deux films, deux ambiances et pourtant une même logique chez Ruben Alves : partir d’un sujet à forte consonance sociétale pour emmener son récit vers la comédie attachante et populaire.
Thierry Cheze

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CITY HALL ★★★☆☆
De Frederick Wiseman

Dans son précédent film, Monrovia, Indiania, le documentariste Frederick Wiseman plongeait en terre trumpiste, avec un regard neutre d’observateur. City Hall, où il revient dans sa ville de naissance, Boston, obéit à une autre logique. La maestria de sa mise en images, de son récit au long cours des différentes actions quotidiennes des services publics de la ville reste intacte. Mais le choix de cette ville dirigée depuis 2014 par Marty Walsh n’a rien d’innocent. Wiseman s’y emploie à décrire un possible modèle anti-Trump en donnant à voir les succès d’une politique qui refuse le repliement sur soi, les coupes dans le budget public, le « marche ou crève » au nom du plus fort. Jamais d’ailleurs, il n’avait à ce point mis en valeur un individu au cœur d’un collectif, Walsh, homme abîmé par la vie qui a placé la résilience au cœur de sa vie comme de son action. Un homme providentiel pour un grand moment de cinéma politique.
Thierry Cheze

 

PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIMÉ

PENINSULA ★★☆☆☆
De Yeon Sang-ho

Belle surprise de 2016, Dernier train pour Busan réinventait à lui tout seul la grammaire visuelle du film de zombies, avec un film sanguin et racé pratiquement totalement en huis clos. Depuis, Yeon Sang-ho a fait une halte chez les super-héros (Psychokinesis, disponible sur Netflix), avant de retourner aujourd’hui aux morts-vivants avec Peninsula. Cette suite, qui se déroule quatre ans après Busan, se joue à une échelle bien plus grande : la péninsule coréenne, abandonnée aux zombies, entassés par dizaines de milliers. Mais un groupe de mercenaires décide d’y retourner pour récupérer une grosse somme d’argent coincée dans un camion de transport de fonds. Ce qui devait être un aller-retour rapide en zone rouge va vite devenir un cauchemar.
François Léger

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ISRAËL, LE VOYAGE INTERDIT – PARTIE II : POURIM ★★☆☆☆
De Jean-Pierre Lledo

Jean-Pierre Lledo est un documentariste franco-algérien dont l’œuvre est consacrée à l’histoire de l’Algérie. Né de père catholique et de mère juive, à Tlemcen, il s’est établi dans le pays de sa naissance et a rompu tous liens avec la partie « juive » de sa famille. Jusqu’à boycotter Israël et refuser de se rendre à l’enterrement de son oncle maternel. C’est par cet aveu qu’il débute son exploration en quatre parties (Kippour, Hanouka, Pourim, Pessah) des préconçus qu’il avait sur ce pays et plus largement de l’histoire des juifs dans les pays arabes et des musulmans en Israël. Film-enquête autant que quête autobiographique, Israël, le voyage interdit met en lumière les discriminations, les pogroms subis par les juifs dans les pays arabes. Accompagné de sa fille Naouel et de Ziva Postec (monteuse de Shoah de Claude Lanzmann), il se rend aussi compte avec perplexité que le reproche de discrimination de ses interlocuteurs arabes est démenti par leur propre situation sociale. Puis revient sur le massacre de Deir Yassin en 1948 et son instrumentalisation. Les témoignages recueillis sont laissés dans la longueur, certains sont plus parlants que d’autres. C’est un peu répétitif parfois. La longueur de ce docu (11 heures) en rebutera certains mais passionnera ceux qui s’intéressent aux relations entre Israël et le monde arabo-musulman.
Sophie Benamon

 

PREMIÈRE N’A PAS AIMÉ

LAST WORDS ★☆☆☆☆
De Jonathan Nossiter

Le cinéaste de Mondovino, Jonathan Nossiter, n’avait pas donné de nouvelles depuis 2014 avec un documentaire sur son amour du vin naturel et biodynamique et du cinéma (Résistance naturelle). Devenu cultivateur en permaculture autour du lac volcanique de Bolsena, en Italie, oeuvrant à faire revivre des légumes et des fruits biologiques ancestraux, il avait mis le cinéma de côté. Il nous revient avec Last Words, un drame apocalyptique labellisé Cannes 2020, dont l’action se déroule en 2086, alors que la terre est un désert sans eau ni électricité. Une poignée d’hommes et de femmes survivent ça et là. Quand son héros Kal tombe sur des bobines de films, il décide de remonter à leur source : la cinémathèque de Bologne où un vieil ermite a remis en fonctionnement un projecteur. La rencontre avec le cinéma va créer un électrochoc chez le jeune Kal. Les deux hommes partent à la recherche de la dernière communauté en Grèce. Hélas, malgré de bonnes intentions (la culture élève l’humanité), le film se perd entre deux axes. D’un côté, Nossiter offre une réécriture de Vendredi ou la vie sauvage un peu maladroite où Kal l’Africain va apprendre de son « maître » européen, autant qu’il le sauve de la solitude. Il faut attendre une bonne heure pour que la deuxième phase du film commence, celle de communion par le cinéma. Les séances de spectateurs éblouis sont assez répétitives, les scènes érotiques carrément gênantes. Puis Kal se fait cinéaste (avec une caméra bricolée maison) et révèle le pouvoir ultime du 7e art : témoigner des histoires. Ouf, c’est (enfin) fini !
Sophie Benamon

POLY
★☆☆☆☆
De Nicolas Vanier

Sept ans après Belle et Sébastien, Nicolas Vanier revisite un nouveau feuilleton télé imaginé par Cécile Aubry autour de l’amitié entre un petit garçon et un poney shetland. Ici, exit le garçonnet. Place à une petite fille, qui a suivi sa mère divorcée dans un village du Sud où elle va libérer ledit poney des griffes du propriétaire d’un zoo. Et si Vanier situe ce reboot dans les années 60, il n’a de cesse d’y distiller à marche forcée des éléments de modernité anachroniques autour de la place des femmes, de la maltraitance animale… Tout à cette obsession – très adulte – de faire passer des messages, Vanier sacrifie ce qui faisait le sel du feuilleton : le charme poétique d’une histoire racontée à hauteur d’enfants. Le résultat se révèle trop calibré, dans sa reconstitution d’une époque, et trop maladroit, dans l’écriture de ses personnages, pour convaincre.
Thierry Cheze

 

Et aussi
Le feu sacré, d’Eric Guéret
Pas en mon nom, de Daniel Kupfestein

Reprises
Manhunter, de Michael Mann