Spike Lee
Abaca

Dans Da 5 Bloods, à voir sur Netflix, le réalisateur réfléchit à l’expérience afro-américaine de la guerre.

Spike Lee n’était pas au Festival de Cannes le mois dernier (où il aurait normalement dû assurer les fonctions de président du jury), mais il est sur Netflix, dès demain, avec son nouveau film Da 5 Bloods – Frères de sang. Un récit d’aventures dans lequel quatre vétérans afro-américains reviennent au Vietnam, cinquante après le conflit, pour y récupérer la dépouille de leur ancien officier mort en mission, et retrouver au passage un trésor enterré dans la jungle. Le réalisateur de Do the right thing, récemment remis en selle par le carton de BlacKkKlansman, revient au film de guerre, un genre qu’il avait déjà abordé dans Miracle à Santa Anna, en 2008.

Notre critique de Da 5 Bloods

Spike Lee est également ce mois-ci dans les pages de Première : le cinéaste nous a accordé une interview dans laquelle il revient en détail sur la fabrication de Da 5 Bloods. Il y réfléchit notamment au prix payé par les Afro-Américains dans les guerres et les combats menés par les Etats-Unis, de la Révolution américaine à la guerre du Vietnam. Extrait :

"Je ne suis pas à l’origine de Da 5 Bloods. Le producteur Lloyd Levin avait acheté ce scénario écrit par deux auteurs, Danny Bilson et Paul De Meo, et a un jour lu un portrait de moi dans le Guardian où je citais Le Trésor de la Sierra Madre… Il s’est dit que j’étais peut-être l’homme de la situation [l’intrigue de Da 5 Bloods évoque en effet celle du classique de John Huston avec Humphrey Bogart – ndlr]. Quand j’étais gosse, à Brooklyn, l’une de mes activités préférées était de regarder les vieux films de guerre qui passaient à la télé. Mon père n’a pas combattu pendant la Seconde Guerre mondiale, il avait les pieds plats, mais ses frères, oui. Ils ont fait partie du Red Ball Express, en France, après le Débarquement. Miracle à Santa Anna mettait en scène les Buffalo Soldiers qui ont combattu en Italie contre les fascistes de Mussolini et les nazis d’Hitler. La guerre a toujours une source de conflit intérieur pour les Afro-Américains : ils se sont battus pour leur pays, les Etats-Unis, mais ont néanmoins été traités comme des citoyens de seconde zone. C’est pour ça que je tenais à cette scène, dans Da 5 Bloods, où Chadwick Boseman dit que la première personne à être morte pour l’Amérique était un homme noir. Il fait référence à Crispus Attucks, qui a été tué par les Anglais lors du Massacre de Boston [en 1770 – ndlr]. Nous nous sommes toujours battus pour ce pays. Au pic de la guerre du Vietnam, les Afro-Américains représentaient 10% de la population américaine et un tiers des troupes combattant au Vietnam ! Vous vous rendez compte ? Comment est-ce possible ? Voilà le genre de réflexions que mon co-scénariste Kevin Wilmott [déjà coauteur de BlacKkKlansman -ndlr] et moi voulions apporter au projet."

L’intégralité de notre interview de Spike Lee est à retrouver dans Première n°508, actuellement en kiosques.