Les Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne
Sony Pictures Releasing France

Le Secret de la Licorne revient à 21h sur France 2.

En 2011, la rédaction avait rencontré Steven Spielberg et Peter Jackson pour parler de leur adaptation de Tintin. A ne pas manquer en attendant la rediffusion du film d'animation, ce soir à 21h sur la 2e chaîne.

Euphorisant, hybride et explosif : la révolution Tintin ? [critique]

Interview publiée en coctobre 2011 sur Premiere.fr : 
C'est l'événement cinéma de l'année. Le film que les cinéphiles attendent depuis près de 30 ans; l'adaptation d'un classique de la BD franco-belge par le génie américain. Tintin par Spielberg, produit par Peter Jackon. Quelques heures avant la sortie de Tintin et le secret de la Licorne en 3D, Steven Spielberg et Peter Jackson ont répondu aux questions de Premiere.fr. Une interview exclusive où il est question de BD, d'enfance, de technologie. Et de cinéma.
Par Benjamin Rozovas

Première : Bonjour messieurs. Est-ce que vous pouvez commencer par nous expliquer, l’un comme l’autre, comment vous êtes rentrés en contact avec Tintin…
Steven Spielberg : J’y suis venu très tard, personnellement. En 1981, au moment de la sortie en salles des Aventuriers de l’arche perdue, une critique de mon film parue dans un magazine français n’arrêtait pas de le comparer à cette bande dessinée appelée Tintin. Je ne comprenais pas ce que c’était, ni ce que ça voulait dire. Je suis donc parti à la recherche des albums de Tintin et j’ai tout de suite compris de quoi parlait la critique en question. J’ai lu tous les albums d’une traite et je me souviens avoir pensé que ça donnerait une série de films fantastique. Et nous voici, trente ans plus tard…

Peter Jackson : Je suis fan de Tintin depuis mon plus jeune âge – je devais avoir huit ou neuf ans lorsque j’ai découvert les albums. Depuis, je n’ai jamais arrêté de les lire, encore et encore, sans m’en lasser. Ils ont toujours la même fraîcheur… Je savais que Steven détenait les droits d’adaptation et, en tant que fan, ça fait des années que j’attendais de voir sa version de Tintin au cinéma. Lorsqu’il m’a finalement demandé de m’impliquer avec lui dans cette aventure, j’étais bien sûr très excité.

Première : Comment êtes-vous venu à travailler tous les deux exactement ?  
S.S : Je suis un grand admirateur du travail de Peter. Après avoir vu Le Seigneur des Anneaux, je suis devenu un vrai fanboy, obsédé par le monde incroyable qu’il a imaginé pour nous à partir des récits de Tolkien. Je ne me doutais pas une seconde de sa passion pour Tintin et j’ai décidé un beau jour de l’appeler et de lui en parler. Mais je n’ai pas été tout à fait honnête dans ma démarche. J’ai d’abord demandé à sa société d’effets spéciaux, Weta Digital, d’effectuer le tout premier test en motion capture pour voir à quoi pourraient ressembler sur pellicule Tintin et Milou. Des mois plus tard, je reçois le résultat et je découvre, à ma grande surprise, un parfait Milou habillé d’un costume du Capitaine Haddock ! A ce stade, je me suis dit que j’avais mis Peter à moitié enceinte et qu’il était temps de le demander en mariage. A peine lui avais-je proposé de réaliser une série de films Tintin avec moi qu’il explosait de joie ! Il m’a dit : “Tu devrais voir ce que j’ai derrière moi au moment où je te parle : l’entière collection des albums d’Hergé !” Voilà comment tout a commencé…

P.J :  Une expérience géniale ! Etant tous les deux fans de la BD, je rebondissais sur ses idées, il rebondissait sur les miennes, un dialogue fécond s’est immédiatement installé entre nous. Et on est très vite revenus aux dessins originaux d’Hergé. On a parlé au début d’un film d’action live mais il est rapidement devenu évident qu’on ne pourrait pas célébrer le artwork et le design d’Hergé en castant des acteurs de chair et d’os.

S.S : Pour trouver le bon Haddock, il aurait fallu remonter le temps et caster le Walter Mathau d’il y a trente-cinq, quarante ans…

Andy Serkis : "Je veux rejouer le Capitaine Haddock !"

Première : On sait que James Cameron a partagé avec vous son expérience sur “Avatar” pendant la préparation de “Tintin”. S’agit-il d’une nouvelle étape dans le domaine des effets spéciaux ?   
S.S : Vas-y Peter, à toi de jouer !

P.S : Ah ah ok ! D’abord, il faut bien comprendre sur un projet comme celui-là que la technologie n’est qu’un outil, rien de plus. On se retrouve comme au temps de l’invention de la caméra ou de l’enregistrement audio; l’équipement est flambant neuf et il faut maintenant lui trouver des applications. On s’est donc servi de la technologie développée tout au long de ces dix dernières par des cinéastes tels que James Cameron et d’autres, mais en la pliant à nos volontés ; la façon d’utiliser la motion capture est propre à chaque cinéaste, à chaque film. Par exemple, la plupart des réalisateurs enregistre une scène en Mo-Cap, la stocke dans l’ordinateur, puis met en place les angles de camera pour chacun des plans en rejouant la dite scène. Steven, lui, a filmé chacun des plans comme une performance unique, des plans “live”, exactement comme on le ferait pour un film en prises de vues réelles. D’une certaine façon, ce que l’on a fait d’un point de vue technologique sur Tintin a été de “passer outre” la technologie et de traiter l’ensemble comme un film d’action en dur tourné dans un décor virtuel. On était au beau milieu d’un plateau vide, sans décors, sans lumières, simplement ces acteurs en costumes de Mo Cap entourés de quelques accessoires rudimentaires…

S.S : Mais quand on regarde dans l’oeilleton de la camera, on est à l’intérieur du monde d’Hergé ! Je voyais Tintin, le capitaine Haddock, je voyais les décors, les rues, les étals du marché, les bateaux, tout ce qui a été construit pour le film. J’étais dans le monde ! La technologie ici a été l’outil de la libération du cinéaste. Je me suis senti libre comme jamais ! Mais pour revenir à James Cameron, oui, il a été super avec nous ! Peter a travaillé longuement avec lui sur Avatar, et je l’ai moi-même rencontré au milieu des années 80 à la fin du tournage de Terminator. On est restés très bons amis depuis… Les gens s’imaginent qu’il existe une rivalité entre cinéastes à Hollywood, qu’on ne partage pas nos “secrets” sous peine d’en perdre la paternité, mais c’est une communauté au contraire très soudée. Ce sont les studios qui sont en guerre, nous on s’adore, on se montre nos films, on s’invite les uns les autres sur les tournages… Cameron a été très généreux et il m’a invité dans ce qu’il s’appelle son “Volume” (le plateau vide faisant office de décor virtuel, ndr) . J’ai eu la chance de mettre la main à la pâte, de tâter l’équipement. C’était assez dingue de voir ce film prendre forme… Sur un période de trois mois, j’ai passé une dizaine de jours à le regarder assembler Avatar. J’ai énormément appris, ça m’a aidé à atteindre une certaine zone de confort pour réaliser Tintin.   

Quel est le plan pour d’éventuelles nouvelles aventures de Tintin au cinéma ? Est-ce que Peter prendra le relais pour la suite ?
P.J : On espère vraiment en faire plus, c’est bien sûr l’objectif qu’on s’est fixés. On a littéralement tiré à pile ou face pour décider qui réaliserait le premier film de la série, et il est plus ou moins entendu que je réalise le second, oui. Je croise les doigts… Quant à l’avenir de la série, toutes les pistes sont envisageables, il y a tellement d’histoires merveilleuses : Les Sept boules de cristal, Le Temple du soleil, On a marché sur la lune, Tintin au Tibet… Toutes différentes les unes des autres, en lieux visités, en tonalité, en péripéties… Je suis très excité par ce film, mais sans doute encore plus à l’idée d’en faire d’autres !

S.S : Si le public répond présent, et qu’une suite se justifie, je soutiendrais Peter comme il m’a soutenu sur celui-ci. Bien que situé en Nouvelle Zélande, il était “physiquement” présent pendant tout le tournage du film via téléconference. Il avait accès aux acteurs, au travail de caméra, il échangeait des idées… Sa voix sortait du speaker à l’intérieur même du “Volume”. Il n’était pas uniquement avec nous “par la pensée”, il était présent chaque jour du tournage en Mo-Cap. Pour la première fois de ma carrière, j’ai eu un vrai partenaire créatif à mes côtés. J’aimerais vraiment lui rendre la pareille si on a la chance de faire un second Tintin...

Bande-annonce :