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De Vice Versa à Star Wars, les meilleures BO de 2015 sont là. Attention : Michael Giacchino est cité trois fois dans ce classement.

Evoquer les bandes originales de films en 2015 c'est évoquer le deuil. Celui du compositeur légendaire James Horner, auteur de tant de partitions géniales (Braveheart, Titanic, Rocketeer, Glory, Le Petit dinosaure et la vallée des merveilles...) est disparu accidentellement en juin dernier avec quatre bandes originales en mixage. C'est parler en contraste de la forme ahurissante de notre chouchou Michael Giacchino, qui a signé quatre BO dont trois se retrouvent dans notre top 2015 (l'autre c'est Jurassic World, honorable mais pas dingue). C'est parler de cette année qui se termine sur une nouvelle partition de John Williams pour Star Wars : Le Réveil de la Force. C'est parler de rock iranien, de symphonie galactique, d'espions Guerre froide, de Nirvana repris par les Enfants perdus. Et forcément de James Horner, encore une fois, pas la dernière.

James Horner : ses plus grandes musiques de film

Jupiter : Le Destin de l'univers


Le film, on va le dire gentiment, partage. Pas sa musique immensément et constamment surexcitante, vertigineuse comme une cathédrale spatiale, un opéra guerrier galactique qui n'a peur de rien. Le score de Jupiter Ascending ressemble beaucoup à celui de John Carter, autre partition sublime de Giacchino. Après Mars, Jupiter. La titanesque symphonie des planètes de Giacchino nous fait fermer les yeux et imaginer Gods of Mars, la suite de John Carter qui n'arrivera jamais.

Vice Versa


Ultime baroud d'honneur de Pixar ? Vue la panouille du Voyage d'Arlo, peut-être. Arlo était mis en musique façon country banale par les frangins Jeff et Mychael Danna. Pete Docter s'est réservé Giacchino pour Vice Versa - Michael avait déjà signé les trois meilleures musiques des Pixar -Là-haut (musique pour pleurer), Les Indestructibles (musique pour s'évader) et Ratatouille (musique pour se réconcilier avec l'accordéon). Ici Michael tient dès le départ un thème superbe et ne le lâchera plus, le déclinant à travers toute une palette d'émotions folles. Mais c'est la Joie qui domine tout, jusqu'au bout.

A la poursuite de demain


On vous avait prévenus : encore une BO de Giacchino. Et encore une baffe. Michael compose une partition surpuissante mais étonnamment triste, illustrant à merveille l'héroïsme tragique qui a nourri le film de Brad Bird (gros, gros flop en salles). Surexcitante comme la musique qui résonne dans la tête d'un enfant lors d'une première visite à Disneyland. La lumière qui irradie du score de Tomorrowland est celle de l'utopie, de la cité divine dont toutes les créations humaines ne sont que de vaines tentatives de copies, vouées à l'imperfection et à la ruine.

Agents très spéciaux : Code U.N.C.L.E.


Déjà on trouve que le film, leçon de cool absolue, est incroyablement sous-estimé. Ensuite l'utilisation de la musique placée avec une justesse folle (Roberta Flack en générique, Solomon Burke, des classiques pop ritals...). Et ce score signé Daniel Pemberton (l'excellente musique de Cartel de Ridley Scott) qui est une de nos claques de 2015. On se shootera encore longtemps à ces cocktails d'adrénaline électriques qui renvoie le 007 Spectre par Thomas Newman dans ses pantoufles.

Pan


Mais dites donc, John Powell, ça ressemble beaucoup à votre musique de Dragons 1 et 2, tout ça. Oui, mais ça n'en reste pas moins plus excitant que la majorité des scores de fantasy épiques de l'année, aussi ronflants qu'attendus. Même si la BO transporte directement le film dans le monde du musical de Broadway avec ces reprises chorales hyper kitsch de Smells Like Teen Spirit (!) et Blitzkrieg Bop (?). Ca passe ou ça casse. Le film s'est planté en salles.

The Duke of Burgundy


Rachel Zeffira et Farris Badwan, alias Cat's Eyes, avaient enregistré en 2011 leur premier album au Vatican. La BO de The Duke of Burgundy en est la suite parfaite. Des petites bulles pop parfaites et mortifères (guitare, clavecin et flûtes), qui composent une petite messe des morts où Lee Hazlewood passerait les burettes à Rachel et Farris.

A Girl Walks Home Alone at Night


Electro, techno, punk, country-spaghetti et rock forment une danse macabre étourdissante de vitalité sanguine autour de la figure d'un vampire féminin. C'est un peu comme entendre hurler les coyotes du désert nocturne en train de dévorer les cadavres des Cramps. Une mixtape décapante, dérangeante, originale, irritante, indispensable. Un peu comme le film, en fait.

It Follows


Le film d'horreur réellement terrifiant de David Robert Mitchell hante les top 10 de la planète cinéma. Son horreur est totale et sa musique -première compo ciné de Richard Vreeland alias Disasterpeace- sonne à grands coups de basse et de steel guitar carpenteriennes l'arrivée du cauchemar, comme le battement de cœur d'un Grand Ancien qui sort peu à peu du sommeil.

Le Dernier loup


Trois films portaient la musique du regretté James Horner cette année : La Rage au ventre, The 33 et Le Dernier loup. Aux deux premières, hyper classiques et oubliables, on préfère de très loin celle du dernier Annaud. James et Jean-Jacques, qui s'étaient rencontrés et engueulés pendant l'enregistrement du Nom de la rose, se retrouvèrent pour Stalingrad, Or noir et ce Dernier loup. Où James déploie une dernière fois une surpuissance orchestrale, colossale, totale, du leitmotiv à la simple coloration de scène en harmonie avec la caméra d'Annaud. Il reste encore une musique de James à découvrir : celle du remake des Sept mercenaires qui sort l'an prochain. On l'attend de pied ferme alors que les loups nous hurlent de les rejoindre chasser dans la steppe.

Star Wars : Le Réveil de la Force


OK, globalement ce n'est pas du niveau des inoubliables de John Williams. Il manque par exemple un vrai thème pour les méchants du First Order, et un autre pour la Résistance. Un truc martial inconique. N'empêche, quel pied. Même en mode mineur Maître John fout au tapis 99% (chiffre scientifique) de la concurrence rien qu'avec ses scènes de bataille furieuses. Au-delà de sa réutilisation de thèmes légendaires (le Force Theme, toujours beau à pleurer) la partition recèle des trésors qui apparaissent au fur et à mesure des écoutes. Jeunes vaniteux, contemplez ce Rey's Theme, la plus belle réussite du score, morceau très finement tissé et terrassant d'émotion, et rappelez-vous que la beauté existe.