L'art de la castagne selon Bradley James Allan, chorégraphe du Dernier pub avant la fin du monde
20th Century Fox/Universal/UIP
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Fan de Jackie Chan
Seasonal Film Corporation
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Face au maître
Golden Harvest
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Hollywood !
Universal
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Rencontre avec Guillermo Del Toro
Universal
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Edgar Wright et Scott Pilgrim
Universal
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Le Dernier pub avant la fin du monde
UIP
L'art de la castagne selon Bradley James Allan, chorégraphe du Dernier pub avant la fin du monde
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Fan de Jackie Chan
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Face au maître
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Hollywood !
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Rencontre avec Guillermo Del Toro
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Edgar Wright et Scott Pilgrim
L'art de la castagne selon Bradley James Allan : Le Dernier pub avant la fin du monde

Fan de Jackie Chan

Avant de mettre au tapis les plus grandes stars de la castagne, l'Australien Bradley James Allan encaisse quelques coups durs : enfant, son petit gabarit fait de lui la cible favorite des gros durs de l'école et c'est pour lui donner les moyens de se défendre que son père l'inscrit pour ses dix ans à des cours d'arts martiaux. Fan de Jackie Chan, Brad Allan partage son adolescence entre les tatamis et le visionnage intensif des films de son idole, avec une fascination particulière pour La Hyène intrépide, Le Chinois se déchaîne et Le Maître chinois.

Et déjà à cette époque, ce n'est pas tant la puissance de frappe de Chan qui le fascine, que la précision de ses gestes et l'inventivité de ses chorégraphies. Bien qu'il étudie plan par plan les moindres gestes de Chan, Brad Allan ne compte par faire carrière dans le cinéma mais espère devenir gymnaste professionnel. Jusqu'à ce qu'une blessure contractée lors d'un entraînement le contraigne à se réorienter vers le grand écran.

Face au maître

Pour parvenir à ses fins, Bradley James Allan décide de se former à tous types de combats : déjà gymnaste accompli, il s'inscrit à des cours de karaté, de judo, d'aïkido de boxe (il est fan de Mohamed Ali) et surtout de Wu Shu sous la direction de Liang Chang Xin, ancien comparse de Jet Li. Grâce aux conseils et au soutien de son maître, Bradley James Allan décroche une bourse pour se perfectionner en Chine où il fait ses premiers pas devant la caméra dans l'oubliable Drunken Master III. Le petit  compte poursuivre sa carrière en Australie, mais le travail des cascadeurs locaux sont bien éloignés de son goût pour les chorégraphies du cinéma asiatique. Sa carrière cinéma semble dans une impasse, lorsque ses collègues de la New Generation Stunt lui apprennent qu'ils vont travailler sur le prochain film de Jackie Chan qui se tourne en Australie : Mister Cool. Bradley Allan s'incruste sur le plateau, impressionne Cho Wing, bras droits de Jackie Chan, puis la star en personne qui décide de l'intégrer à son équipe de cascadeurs, la Sing Ga Ban. Ultime consécration, Bradley James Allan joue même un petit rôle lui permettant d'affronter Jackie Chan dans la médiocre comédie romantique Gorgeous. Si la rapidité et la précision du jeune homme a séduit Chan, le fait que Bradley Allan soit légèrement plus petit que lui (1,63 m seulement) n'est également pas étrangère à son embauche.

Hollywood !

Jackie Chan pousse dès lors Bradley James Allan à perfectionner ses talents de comédien, mais ce dernier préfère se consacrer à la maîtrise de son corps (il fait même un passage au Cirque du soleil à cette fin), puis décide de voler de ses propres ailes sur des films internationaux. Son talent lui ouvre des portes : grâce à sa connaissance de l'usage des câbles, le coordinateur des cascades de Rush Hour II l'embauche sur les scènes de vol du Peter Pan de P.J. Hogan, puis le réalisateur de seconde équipe de ce film l'invite à chorégraphier les combats des Chroniques de Riddick, principalement pour donner aux déplacements du personnage de Kyra (Alexa Davalos), une grâce toute féminine. Car comme dans les meilleurs films de Hong-Kong, la chorégraphie des combats chez Bradley James Allan est tout autant affaire de personnage que de prouesse physique.

Rencontre avec Del Toro

Après être retourné dans le giron de Chan, notamment pour New Police Story, Brad Allan fait une nouvelle rencontre déterminante en 2008 en la personne de Guillermo del Toro. Mécontent des cascades du premier Hellboy, le cinéaste mexicain souhaite rectifier le tir pour la suite et il débauche l'Australien, dont le style est spécialement sensible sur les combats de Nuada (Luke Goss) : l'aspect éthéré du prince déchu doit trancher avec la puissance brutale d'Hellboy. Allan double lui-même Goss sur une cascade que toute l'équipe estime impossible à accomplir : Nuada court sur des tuyaux, puis sur un mur, avant de donner un coup d'épée à un adversaire. Les combats d'Hellboy II Les légions d'or maudites bénéficient également de sources d'inspiration moins courantes dans le cinéma d'action : Bradley James Allan cite ainsi Les Temps modernes de Charlie Chaplin pour le duel final, dans lequel les personnages s'affrontent sur de grands rouages. Très satisfait de son travail, Del Toro rappellera Bradley James Allan pour Pacific Rim et, surtout, le présente à l'un de ses amis : Edgar Wright.

Edgar Wright et Scott Pilgrim

Lorsque Wright rencontre Bradley James Allan, le cinéaste est en pleine conception des animatiques des scènes de combat de Scott Pilgrim. Grand amateur du cinéma de Hong Kong, et en particulier de Jackie Chan, Wright, ambitionne de concevoir des combats "peu violents et très inventifs". Bradley James Allan va avoir la lourde tâche d'entraîner les comédiens sans aucune prédisposition aux arts martiaux, ce qui provoquera de sévères courbatures et quelques bleus : Michael Cera se prend le pied de la doublure de Matthew Patel en pleine figure. Un incident qui n'empêche pas à Wright et Allan de s'entendre à la perfection. Au cours du tournage, ce dernier offre même un beau cadeau au cinéaste, en demandant à Jackie Chan de lui enregistrer un message vidéo personnalisé. Logiquement, la vedette du Marin des mers de Chine sera remerciée au générique de fin de Scott Pilgrim. "À travers Brad, nous étions les bénéficiaires du savoir de Jackie Chan", déclarera Wright.

Le Dernier pub avant la fin du monde

Alors que Bradley James Allan part retravailler avec Jackie Chan sur Chinese Zodiac, Edgar Wright écrit le scénario du Dernier Pub avant la fin du monde en sachant précisément qu'il lui confiera des scènes de combat dans lesquelles les personnages pourront se révéler, voire se réaliser, à travers des combats plus brutaux et plus réalistes que ceux de Scott Pilgrim. Et c'est très logiquement que les deux hommes trouvent une référence primordiale pour ce nouveau projet commun, avec l'un de leur film fétiche : Le Maître chinois (Drunken Master) dans lequel Jackie Chan doit s'alcooliser pour déployer toute l'ampleur de ses talents de combattant. Si Le Dernier Pub avant la fin du monde est un nouveau sommet dans la carrière de Bradley James Allan, c'est aussi le troisième film après Scott Pilgrim et Chinese Zodiac sur lequel il prend du galon en étant crédité réalisateur de seconde équipe.

Ce pro des arts martiaux, entraîné par Jackie Chan, est mort à seulement 48 ans.

Protégé de Jackie Chan et collaborateur fétiche d’Edgar Wright, Bradley James Allan était probablement le chorégraphe de combats le plus talentueux de sa génération. On a appris sa mort ce week-end, et sans surprise, le réalisateur de Scott Pilgrim et du Dernier pub avant la fin du monde lui a rendu un bel hommage sur Twitter. Nous nous étions penché sur sa carrière à l'occasion de la sortie de ce film, dernier opus de la "Cornetto Trilogy" sorti au cinéma en 2013. Depuis, il a travaillé sur Wonder Woman, Kingsman, Solo : A Star Wars Story, ou encore Shang-Chi : La Légende des Dix Anneaux, le prochain super-film de Marvel. Il est décédé d'une crise cardiaque, a révélé l'acteur et réalisateur Daniel Wu.

Jackie Chan a publié un long message pour honorer sa mémoire, où il revient sur leur collaboration, puis sur ses projets en solo : "Il y a de longues années, alors que je tournais Mr. Nice Guy, c’était juste un fan qui venait visiter le plateau. A cette époque, il était fou de Kung Fu chinois, qu'il pratiquait depuis de nombreuses années. C’est grâce à ses compétences et à son talent incroyable qu’il est passé de fan à cascadeur et a finalement rejoint mon équipe JC Stunt. Il s’est même battu avec moi dans Gorgeous. Je pense que beaucoup de gens se souviennent de cet habile boxeur dans le film. Il a également contribué à plusieurs de mes films. Au fil des ans, il a réalisé des chefs-d’œuvre qui ont marqué beaucoup de monde dans l’industrie cinématographique, y compris la série de films Kingsman, Wonder Woman et bien d’autres, faisant de lui un chorégraphe d’action célèbre et reconnu à Hollywood, ainsi qu'un excellent modèle pour de nombreuses stars de l’action."

Voici les origines de ce roi de la baston.

Par Julien Dupuy


Jackie Chan a enfin son Oscar