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A l’occasion de la sortie de L’Odyssée de Pi, le nouveau film d’Ang Lee, les distributeurs français ont eu l’idée de projeter le film dans une piscine. Non pas balancer les bobines à la flotte, mais de monter un écran dans une piscine, de mettre à l’eau des barques en guise de rangées afin de vivre l'odyssée de Pi à fond, d'immerger les spectateurs dans l’univers du film. Qui raconte comment le jeune Pi, seul survivant d’un naufrage en plein océan Pacifique, doit cohabiter sur un canot de sauvetage avec un tigre du Bengale.EmbarquementLa salle de cinéma temporaire a donc été installée à la piscine Pailleron, dans le 19ème arrondissement parisien. La première projection a eu lieu mercredi soir, alors que la température baissait dangereusement et que les spectateurs étaient déjà frigorifiés à l’idée de passer deux heures sur une barque dans l’eau. En pénétrant dans la piscine, le choc : il fait une chaud. Très : les radiateurs ont été poussés à fond, à tel point qu’on est limite tentés de se mettre en maillot. Des hôtesses en sari (le héros du film vient de Pondichéry) nous guident alors dans les deux étages de coursives qui surplombent le bassin, éclairé par des projecteurs "de rose et de bleu mystique", dans lequel flottent les barques. Dans les cabines, on doit laisser ses affaires et prendre un gilet de sauvetage avant d’embarquer. Et d’espérer que le projectionniste n’a pas confondu les bobines de L’Odyssée de Pi avec celle de The Impossible.TraverséeOn se répartit donc dans les barques (marquées au nom de Tsimtsum, le nom du navire du film, et le principe de création du monde par Dieu dans la kabbale), à trois ou quatre personnes. En rentrant dans ma barque je la fais dangereusement pencher de mon côté (note pour plus tard : ralentir sur les snacks pré-projection), à la grande peur de ma voisine qui répète alors pendant les dix minutes qui précèdent le début du film "ça penche, là, non ?" avec une pointe d’angoisse. Tout le monde enlève vite son gilet de sauvetage -qui augmente sensiblement la température ressentie- au détriment de la sécurité. Et le film commence. Quand le bateau est pris dans la tempête, je me dis que je pourrais commencer à faire un peu bouger la barque pour la blague, mais la tête de mes compagnons de traversée (la personne derrière nous n’a pas retiré son gilet) m'en empêche.DestinationEt la magie opère. Le fait d’avoir vu L’Odyssée de Pi dans une barque a certainement contribué à se mettre dans l’ambiance, mais la puissance des images d’Ang Lee, la beauté de la 3D et la force des visions illustrées à l’écran (la baleine phosphorescente qui jaillit hors de l’eau a été accueillie avec un silence quasi religieux) semblent avoir happé le public -en retirant ses lunettes pour regarder autour de soi pendant le film, on s’apercevait d’ailleurs que l’eau du bassin était parfaitement calme. Personne ne bougeait, plus par fascination par le voyage mystique de Pi que par peur de tomber à l’eau. Le film reste la véritable expérience.Sylvestre PicardBande-annonce de L’Odyssée de Pi, dans toutes les piscines… euh, dans toutes les bonnes salles le 19 décembre prochain :