Affiches sorties de films 28 décembre 2022
The Walt Disney Company France/ Metropolitan Filmexport/ Condor

Ce qu’il faut voir en salles

L’ÉVÉNEMENT
LES BANSHEES D'INISHERIN ★★★★☆

De Martin McDonagh

L’essentiel

Sur une île irlandaise, en 1923, deux anciens copains s’enferrent dans une brouille absurde. Martin McDonagh reforme le duo de Bons baisers de Bruges, Colin Farrell et Brendan Gleeson, et signe une fable très noire, très drôle.

Pour son premier film tourné en Irlande, Martin McDonagh met en scène la brouille absurde entre deux amis Pádraic et Colm (Colin Farrell et Brendan Gleeson), sur une île fictive au large de l’Irlande, en 1923. Une fâcherie qui débute quand Colm décide, du jour au lendemain, de ne plus parler à son vieux copain Une décision incompréhensible et brutale dont le film va examiner les conséquences, d'abord dans le cœur du brave Pádraic totalement pris au dépourvu puis au sein de toute la petite communauté insulaire

D’un argument très mince, qui assume son artificialité, McDonagh développe une réflexion cocasse, cruelle, sur la condition humaine et le désespoir existentiel. Au loin, les échos assourdis de la guerre civile qui déchire le pays souligne la dimension métaphorique de la brouille entre les deux ex-amis. Sombre, assez désespéré, mais aussi très drôle, le film doit beaucoup à ses acteurs, tous très subtils. Gleeson incarne avec beaucoup de profondeur son personnage de mélomane taciturne, tandis que Colin Farrell trouve sans doute ici le meilleur rôle de sa carrière, passant génialement, de la bonhomie à l’hébétude, puis au désespoir absolu.

Frédéric Foubert

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PREMIÈRE A AIME

VIVRE ★★★☆☆

De Oliver Hermanus

Prix Nobel de littérature, auteur des Vestiges du jour, Kazuo Ishiguro jette un pont entre le Japon, où il est né, et le Royaume-Uni, où il vit depuis son enfance. C’est lui qui a initié et scénarisé ce remake de Vivre (1952), d’Akira Kurosawa, et a choisi de délocaliser dans son pays ce magnifique portrait d’un petit bureaucrate qui, apprenant qu’il souffre d’un mal incurable, se lance dans un projet qui pourrait donner un sens aux quelques mois qui lui restent à vivre : l’assainissement d’un terrain vague et la construction d’un jardin d’enfants. Ishiguro et le réalisateur Oliver Hermanus mettent ici en parallèle les sociétés japonaise et britannique, l’idée d’un ordonnancement social strict qui étoufferait l’individu. Le film dépeint très joliment ce monde corseté et succédant au grand Takashi Shimura, Bill Nighy livre une impressionnante prestation minimaliste, minérale, à rebours de ses facéties habituelles de baby-boomer rock’n’roll. Une leçon d’humanisme et d’élégance.

Frédéric Foubert

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HINTERLAND ★★★☆☆

De Stefan Ruzowitzky

Oscarisé en 2008 avec Les Faussaires situé au cœur de seconde guerre mondiale, l’autrichien Stefan Ruzowitzky s’intéresse ici à la période située à la fin de la première, après la chute de l’Empire austro- hongrois, dans les pas de soldats prisonniers qui reviennent dans un pays qu’ils ne reconnaissent plus, l’un d’eux, reprenant son métier de policier, se mettant à enquêter sur une série de meurtres dont sont justement victimes des vétérans. Le cinéaste mêle ici thriller et portrait d’un monde que le cocktail tragique entre montée du chômage et des pulsions nationalistes conduira 20 ans plus tard à la folie hitlérienne. Le tout dans un geste artistique audacieux, les rues de Vienne recréées en numérique sur fond vert, dans une ambiance évoquant le cinéma expressionniste de ces années- là et créant une atmosphère tout à la fois dérangeante et étouffante, écrin parfait à son récit.

Thierry Cheze

JOYLAND ★★★☆☆

De Saim Sadiq

C’est l’histoire d’un Pakist (Ali Junejo), à l’étroit dans son couple, emprisonné dans une famille patriarcale et des lois désuètes. On l’intime de se ranger. Devenir père, trouver un job, « se viriliser ». Il exécute. Déniche un petit boulot dans un cabaret. Rencontre une danseuse trans saisissante Biba (Alina Khan). Et tombe sous son charme. Saim Sadiq filme, sans effet démonstratif, la banalité d’une liaison amoureuse, les premiers émois, les longs dilemmes, les tabous, le retour des mœurs locales. L’amour est politique chez Sadiq. Politique et mélancolique. Il tisse des liens impossibles, fixe des caractères et révèle des libertés. Il danse aussi, rit, colore, saigne. Fait la différence. Premier long-métrage pakistanais sélectionné à Cannes et Prix du jury Un certain regard, Joyland s’apprête à postuler aux Oscars 2023. Pour le meilleur.

Estelle Aubin

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LA PASSAGERE ★★★☆☆

De Héloïse Pelloquet

C’est l’histoire d’un coup de foudre qui surgit dans la vie de Chiara, une quadragénaire (Cécile de France, rayonnante), heureuse et épanouie dans le couple qu’elle forme depuis 20 ans avec un pêcheur dont elle partage aussi le métier. Celui – réciproque – qu’elle éprouve pour Maxence (Félix Lefebvre, épatant), de 25 ans son cadet auquel elle va tenter de résister avant que les élans du cœur ne submergent les digues de la raison. Heloïse Pelloquet raconte cette passion qui tente de faire fi des quand dira t’on de la petite île où Chiara vit et où tout le monde connaît tout le monde avec un grand sens du romanesque et une sensualité revendiquée dans des scènes d’amour réalistes mais jamais voyeuristes où le female gaze éclate plein écran. Un premier long métrage emballant jusque dans son épilogue tout sauf convenu.

Thierry Cheze

UNICORN WARS ★★★☆☆

De Alberto Vazquez

Que les parents ne se laissent pas berner par les couleurs chatoyantes et les adorables dessins en 2D : Unicorn Wars n’est pas fait pour les enfants, et les adultes les plus sensibles pourraient bien aussi y laisser des plumes. Alberto Vásquez (Psiconautas) signe un conte animé unique, au croisement des Bisounours, de Full Metal Jacket et d’Apocalypse Now. Il y est question d’une guerre sans pitié entre les oursons et les licornes, et d’un livre sacré prétendant que celui qui s’abreuvera du sang du dernier équidé à corne deviendra un être parfait. Le film questionne tous azimuts l’emprise des récits mythologiques, la religion, la propagande militaire ou la masculinité. D’une violence et d’une noirceur inouïes. Pas pour tout le monde, mais tout le monde serait bien avisé d’y jeter un oeil.

François Léger

PAR COEURS ★★★☆☆

De Benoît Jacquot

Deux artistes. Deux manières d’aborder les textes et par là même leur métier. Benoît Jacquot est allé filmer en Avignon Isabelle Huppert et Fabrice Luchini le temps des répétitions et des représentations de leurs spectacles, en trouvant une manière de les faire dialoguer à distance. Et s’il s’adresse surtout aux initiés, ce documentaire brille par sa capacité à saisir les mystères d’un geste qui reste au fond artisanal et l’intelligence des confidences de ces maîtres du jeu.

Thierry Cheze

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PREMIÈRE A MOYENNEMENT AIME

CARAVAGE ★★☆☆☆

De Michele Placido

Quatre ans après 7 Minuti passé inaperçu, Michele Placido est de retour pour un film appelé à avoir plus d’écho : un biopic du Caravage (Riccardo Scamarcio, inspiré), centré sur la fin de sa vie quand au début du 17ème siècle, accusé de meurtre, il s’est réfugié à Naples en espérant obtenir la grâce de l’Eglise. Cela fait 50 ans que le cinéaste rêvait de lui consacrer un film. Maîtrisant donc son sujet jusqu’au bout des doigts, il a la belle idée de passer par le prisme d’un personnage fictif, un émissaire du Pape chargé d’enquêter sur lui, et de se concentrer sur ses œuvres, leurs inspirations et leur aspect subversif pour raconter l’homme qu’il était. Hélas, ce geste est abîmé par des dialogues qui viennent à chaque fois surligner ce qu’il donne à voir. Cette obsession pédagogique enferme le film dans un classicisme et par ricochet une absence d’audace qui contredit au fond son sujet.

Thierry Cheze

 

PREMIÈRE N’A PAS AIME

M3GAN ★☆☆☆☆

De Gerard Johnstone

Une brillante ingénieure en robotique invente une poupée dotée d'une intelligence artificielle qu'elle offre à sa nièce de 9 ans, orpheline de ses parents disparus dans un tragique accident de voiture. Une poupée qui – ô surprise ! - va échapper à sa créatrice. Tout – jusqu'aux clins d'oeil à Chucky ou Terminator – est téléphoné dans cette nouvelle production Blumhouse, sorte d'épisode raté de Black mirror, semblant uniquement obsédé par son efficacité mais jamais par l'ambition de faire naître un début de commencement d'originalité. Jusqu'à son plan final sur lequel on aurait pu parier dès son entame.

Thierry Cheze

 

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