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Alors que les chaînes ont pris l'habitude de ressusciter de vielles séries terminées, il est aujourd'hui dans l'intérêt des producteurs de toujours laisser une porte ouverte, au cas où un jour...

"The End". Voilà une formule qu'on verra bien souvent cette année sur nos petits écrans. Plusieurs séries majeures feront en effet leurs adieux au public, en 2017, de Teen Wolf à The Leftovers, en passant par Bones ou Pretty Little Liars. Sauf que la formule en question pourrait bien avoir perdu une grande partie de sa signification. À une époque où les chaînes n'ont de cesse de ramener à la vie de vielles séries terminées, "The End" veut plutôt dire "À suivre".


X-Files, 24 heures chrono, Prison Break, Gilmore Girls, La Fête à la maison, et bientôt Twin Peaks ou Will & Grace. Toutes ces séries ont eu droit à un "series finale", il y a 10 ans, 15 ans, 25 ans. Une conclusion en bonne et due forme. Pourtant, elles font aujourd'hui leur retour à l'antenne. On ne parle pas d'un cas isolé. La tendance du revival est massive. À tel point qu'elle impacte désormais le travail des auteurs, qui ne peuvent plus écrire un "final", sans penser à ce que deviendra leur série, dans 10, 15, ou 25 ans.

"On risque de ne plus voir les créatifs prendre de décisions audacieuses"

La possibilité d'une renaissance est assurément un facteur qui rentre en ligne de compte, lorsqu'on imagine une conclusion de série en 2017. C'est ce qu'affirme une récente enquête publiée par le site EW et étayée par quelques créateurs, comme Jeff Davis. Le patron de Teen Wolf qui prépare en ce moment la fin de son show (sur MTV) sait de quoi il parle : "Cela nous empêche de tuer un grand nombre de personnages ! Le fameux épisode de fin de série, où vous faites exploser le monde entier, où vous tuez la moitié de vos personnages principaux, ce ne serait pas très malin de faire ça aujourd'hui."

Forcément : si vous dézinguez tout le monde, vous éliminez automatiquement votre show de la course au revival. Si Mulder et Scully n'avaient pas survécu à la saison 9, pas de retour de X-Files en 2016 pour Chris Carter... Or, on ne sait jamais ce que l'avenir nous réserve et avoir sous le coude cette hypothétique possibilité de relancer un jour leur histoire, s'avère particulièrement rassurante pour les scénaristes. Le risque, évidemment, est artistique : que plus personne n'ose signer de conclusion aux proportions bibliques. Comme celles de Lost , Breaking Bad ou Les Sopranos. "Je crains que cette tendance ne rende les 'series finales' de moins en moins mémorables. Personne n'aime quand la fin d'une histoire est tiédasse. Or, on risque de ne plus voir les créatifs prendre de décisions audacieuses. Ils risquent plutôt de jouer la sécurité. Et les fins risquent de ne plus ressembler à des fins", s'inquiète Jeff Davis.


Cette tendance du revival pourrait aussi avoir un autre effet pervers, chez quelques auteurs jusqu'au-boutistes, qui pourraient s'inquiéter de voir leur concept leur échapper. Certains pourraient choisir, en conséquence, de boucler leur histoire de manière radicale et définitive (en tuant tout le monde par exemple), juste pour supprimer toute chance de reprise par une chaîne, dans un futur plus ou moins proche... 

"Il est possible de faire les deux"

La folie des revivals pourrait donc faire beaucoup de mal au processus artistique et créatif des séries, dans les années à venir. Une inquiétude tempérée par Damon Lindelof, l'une des références en la matière, qui refuse de céder à la panique. Le co-créateur de Lost, qui vient de boucler The Leftovers (diffusion attendue en avril), se veut rassurant : "Il faut simplement mettre des guillemets autour du mot "Fin" aujourd'hui", explique-t-il à EW. "Il est possible de faire les deux : avoir une grande fin et laisser la porte ouverte pour une autre version ou une suite de son histoire. Du moment qu'elle est accessoire et qu'elle ne gâche pas la fin déjà racontée, ce n'est pas un problème." 


Une vision moderne du "series finale" déjà appliquée par la créatrice de Pretty Little Liars. Marlene King avoue au site américain avoir écrit la conclusion de PLL sans penser à l'avenir... tout en laissant quand même une ouverture : "Nous étions tous heureux que la série s'achève. On a vécu du bon temps et c'est bien que ça se termine. Mais en même temps, c'est aussi plus facile de dire adieu à un univers, quand on sait qu'on pourrait tous potentiellement y revenir un jour..."