Toutes les critiques de Gomorra

Les critiques de Première

  1. Première
    par Gérard Delorme

    Voir Naples et pourrir. En s’attaquant à un sujet aussi complexe que la camorra, Gomorra prend le risque de n’en gratter que la surface. À son actif, le film, substantiel et documenté, fait preuve de modernité en intégrant des éléments de langage très contemporains. Du livre colossal de Roberto Saviano, Matteo Garrone a retenu une petite dizaine de personnages représentatifs de la façon dont le crime organisé influe sur la vie quotidienne des Napolitains. Le point de vue offert est volontairement limité au cœur de l’organisation criminelle : on ne voit quasiment jamais la police ni les pouvoirs publics, une façon pour Garrone de tourner à son avantage les limites imposées par la durée du film. On peut s’en trouver frustré, Gomorra manquant de contexte et de perspective politiques. Mais le résultat dépasse largement la simple illustration. Dans un style vif, le cinéaste a tourné sur les lieux mêmes de l’action, avec des acteurs non professionnels. Sa grande force est d’avoir relié les histoires entre elles grâce à des passerelles qui agissent comme des hyperliens et finissent par composer virtuellement un tableau plus grand que la simple somme des parties du film.

Les critiques de la Presse

  1. Paris Match
    par Alain Spira

    Sans emphase, sans chichis cinématographiques, avec la discrétion efficace d'un cinéaste animalier, le réalisateur infiltre, caméra "au point", le quotidien d'une cité-dortoir de la banlieue de Naples, gangrénée par la pieuvre. En suivant les destins qui se croisent comme des tirs d'armes automatiques, ce film, soutenu par des comédiens plus vrais que nature, prend l'accent réaliste du documentaire pour nous faire visiter les couloirs nauséabonds d'une ruche où seuls les plus forts font leur miel.

  2. Pariscope
    par Virginie Gaucher

    Une construction sans faille, une force brutale, une rigueur documentaire caractérisent ce film, qui rappelle plus le Francesco Rosi dénonciateur des années 70 que le Scorsese des « Affranchis » aux héros pourris mais sympathiques. Adaptant le livre de Roberto Saviano, Matteo Garrone peint sans complaisance une réalité occultée, qui a fait bien plus de morts que le terrorisme. La mafia ici n’est ni folklorique, ni romanesque, simplement envahissante et meurtrière. Le Grand Prix mérité du Festival de Cannes 2008.

  3. Elle
    par Françoise Delbecq

    Contraction de Gomorrhe et de Camorra, Gomorra évoque avec brio et violence le destin des personnages unis par le trafic de drogue et le traitement des déchets toxiques (...). Tous les ressorts de domination et de décomposition sont magnifiquement exploités par Matteo Garrone. Ca pue le sang, le soufre, la poudre. Un film qui démonte le mythe du Parrain. A couper le souffle.

  4. Le JDD
    par Jean-Pierre Lacomme

    S'inspirant du livre-enquête de Roberto Saviano, Matteo Garrone signe une oeuvre aussi glaçante qu'impitoyable. En se défiant de tout glamour, façon Le Parrain, le cinéaste se livre à une démythification en règle de l'organisation criminelle. Filmant avec une grande fluidité et de façon presque documentaire, il s'attache à plusieurs personnages (...). Le pittoresque est banni au profit d'un réalisme ravageur dans sa brutalité.

  5. Fluctuat

    L'adaptation du roman de Roberto Saviano a bizarrement reçu le Grand prix du jury à Cannes. S'il ne rentrera pas au Panthéon du genre, il a cependant le mérite d'offrir un regard inhabituel sur le Milieu et ses rouages les plus minuscules. Gomorra s'attache à présenter des tranches de vie d'habitants d'un quartier de la région napolitaine : le gamin de 13 ans qui veut faire ses preuves et intégrer le gang de ses héros, les petites frappes de 20 ans qui jouent aux futurs parrains et en prennent les tics agaçants, le couturier coincé, le comptable effacé, etc. Telle est son originalité : les pontes et autres parrains ne sont guère évoqués. Le récit se penche avant tout sur les « petits », les « riens du tout » qui constituent la base de l'organisation et, souvent, la subissent. Premiers fusibles à sauter en cas de problème, ils sont indispensables au fonctionnement de l'organisation tentaculaire et interchangeables à volonté, comme de vulgaires plombs susceptibles de sauter à tout moment. Et, bien sûr, ils sautent vite dans la chaleur du sud de l'Italie. L'aspect le plus réussi du film est sans conteste la topographie oppressante des lieux. Elle accentue la claustrophobie implicite du Milieu. De grands et longs immeubles abîmés, soit en escalier, soit en blocs parallèles constituent des ensembles fermés, dont le ciel est absent et les rares ouvertures surveillées. Dans ce château fort moderne en état de siège permanent, les gamins, guetteurs ambitieux mais fragiles, sont en haut des miradors. Du plus jeune au plus vieux en passant pas les « Mamas», ils sont tous pris au piège d'un environnement qui ne laisse aucun choix. Pas de juste milieu donc, pas de neutralité envisageable : il faut être avec ou contre la mafia. Dans cet environnement, ne pas choisir c'est déjà mourir. Matteo Garrone, le réalisateur, ne s'en cache pas : «L'histoire était si puissante d'un point de vue visuel que je me suis astreint à la filmer avec une simplicité extrême. » Le récit souffre malheureusement de cette absence de recherche et surtout du manque de construction dramaturgique qu'implique le parti pris de se focaliser sur « ceux qui ne choisissent pas ». Il y a trop de personnages, ou pas assez de temps, pour les identifier clairement et s'intéresser à leurs problèmes. Par ailleurs, certaines pistes prometteuses telles que les interactions entre la mondialisation et la mafia ou encore l'influence des icônes cinématographiques (Le Parrain et Scarface) sur l'imaginaire des aspirants mafieux sont esquissées mais pas vraiment exploitées. Même s'il n'est pas surprenant que l'écrit s'avère une forme plus adaptée à ce type de récit, le film aurait pu bénéficier d'un meilleur traitement. C'est une déception.GomorraDe Matteo GarroneAvec Salvatore Abruzzese, Gianfelice Imparato, Maria NazionaleSortie en salles le 13 août 2008  © Le Pacte  - Exprimez-vous sur le forum cinéma- Lire les fils festival de cannes, sélection officielle, adaptation sur le blog cinéma