Spivet Jean-Pierre Jeunet
Gaumont

Passé inaperçu en 2013, ce film ambitieux tourné aux Etats-Unis avec Helena Bonham Carter revient ce soir à la télévision.

Distribué par Gaumont, L’Extravagant Voyage du Jeune et Prodigieux T.S. Spivet n'a rassemblé que 676 969 spectateurs en octobre 2013 dans les salles françaises, avant de faire un flop aux Etats-Unis, sa promotion étant totalement sacrifiée par Harvey Weinstein. Jean-Pierre Jeunet s'était d'ailleurs publiquement plaint du producteur, bien avant l'affaire d'agressions sexuelles qui a éclaté en 2017.

Pourtant, ce film ne manquait pas d'ambition, le réalisateur du Fabuleux destin d'Amélie Poulain s'entourant d'acteurs talentueux et d'une équipe technique qualifiée pour proposer une aventure à la pointe de la technologie, comme l'écrivait Première en le défendant dans sa critique. A l'occasion de sa rediffusion, ce soir sur Arte, nous la republions ci-dessous.

Jean-Pierre Jeunet accuse Harvey Weinstein de l'échec de son dernier film

Petite remise en contexte : à la fin des années 2000, Micmacs à tire-larigot du metteur en scène avait déçu, et il avait décidé de retourner aux Etats-Unis filmer en 3D son nouveau projet, plus de seize ans après Alien : La Résurrection. Voici donc l'odyssée de T.S., 12 ans, un jeune prodige scientifique (Kyle Catlett), fils d'un cowboy et d'une entomologiste (Helena Bonham-Carter), dont la nouvelle invention vient de recevoir un prix à Washington. Il quitte la ferme familiale du Montana pour un voyage à travers les Etats-Unis, au gré de rencontres improbables et d'épreuves périlleuses. Avec son ambiance western et son héroïsme enfantin qui rappelait entre autres le Moonrise Kingdom de Wes Anderson, Jeunet s'éloignait fortement de ses productions françaises, même si on apercevait le fidèle Dominique Pinon dans quelques scènes.

Suite au flop du film, Jeunet s'est tourné vers la télévision, mais là non plus, le succès n'a pas été au rendez-vous : son pilote de Casanova, tourné pour Amazon, n'a finalement pas été développé en série. Et son film de SF pour Netflix, Big Bug, a lui aussi été boudé par la critique. Tous les détails sont à lire ici :

Jean-Pierre Jeunet s'amuse avec la révolte des machines dans BigBug

Notre critique de T. S. Spivet : "Jean-Pierre Jeunet a changé de directeur de la photo, mais son style est reconnaissable dès le premier plan. Les verts, les jaunes et les rouges dominent, de même que les cadrages au grand-angle, très composés, le tout dans une ambiance post-western totalement vintage. Le ton, lui, mélange de mélancolie et d’humour, rappelle également les grandes heures du Fabuleux Destin d’Amélie Poulain et d’Un long dimanche de fiançailles, films aboutis qui avaient précédé l’accroc Micmacs à tirelarigot.

Plasticien hors pair, le cinéaste français ajoute une nuance à sa palette déjà bien variée : la 3D. Jamais, depuis Hugo Cabret et L’Odyssée de Pi, le relief n’avait été rendu de façon aussi immersive et cohérente, avec le propos – la réalité de T.S. est un peu distordue. Mais cette surabondance de biens est paradoxalement préjudiciable au film, dont les ressorts dramatiques sont comme cassés par la lourde machinerie mise en place et par une voix off redondante.

Le coeur de l’histoire – son rapport au deuil et à la complexité des liens filiaux –, ne bat que par intermittence, au détour d’un plan du père enfin démonstratif ou d’un autre montrant la soeur en pleurs. L’ambition de la mise en scène, l’homogénéité du casting nous incitent cependant à monter à bord du train avec le petit T.S. Spivet."

Bande-annonce :


Jean-Pierre Jeunet : "Il y a autant de cinéma sur Netflix qu'ailleurs"